1.1 Forme bilinéaire symétrique définie positive
Une forme bilinéaire est une fonction scalaire
définie sur linéaire par rapport à la première variable et
linéaire par rapport à la deuxième.
La forme est dite :
-
1.
symétrique si
-
2.
définie non négative si
-
3.
définie positive si
Toute forme bilinéaire définie positive définit un produit
scalaire sur l’espace . L’expression s’appelle produit scalaire
de et . On dit que est orthogonal à si .
Cela équivaut à dire que est alors orthogonal à en vertu de
la symétrie. On dit aussi que et sont orthogonaux. Il est
clair que la notion d’orthogonalité dépend de la forme qui définit le
produit scalaire. L’application qui à tout vecteur associe le
le nombre positif
(1) |
définit une norme. Le nombre est appelé
norme de . Cette norme permet aussi de définir une métrique.
On fixe un produit scalaire qui sera noté et qui définira la topologie sur . L’espace topologique est appelé espace euclidien. On peut alors définir sur cet espace d’autres produits scalaires en introduisant des endomorphismes symétriques par rapport au produit scalaire .
Expression matricielle d’un produit scalaire
Soit un espace vectoriel de dimension muni d’un produit scalaire défini par une forme bilinéaire . Soit la matrice de cette forme dans une base . L’expression du produit scalaire sous forme matricielle est donnée par
Sous forme matricielle, ce produit scalaire s’écrit:
puisque la matrice est symétrique.
Si forment une base -orthogonale de , i.e, , on obtient
Cette notation sera réservée pour désigner le produit scalaire de base dans un repère -orthonormé. On sera conduit à manipuler d’autres produits scalaires. Un endomorphisme est dit symétrique par rapport au produit scalaire s’il vérifie
Si désigne la matrice de , la produit scalaire s’écrit :
La matrice d’un endomorphisme symétrique vérifie donc la condition
Dans une base orthonormée, on a et vérifie . Donc un endomorphisme -symétrique est représenté par une matrice symétrique dans une base orthonormée pour . Attention, une matrice symétrique ne représente un endomorphisme symétrique que si la base considérée est une base -orthonormée. Si est un endomorphisme quelconque de matrice , on a toujours l’identité importante suivante
dont la valeur est donnée par dans le cas où la base est orthonormée. Pour le voir, il suffit d’utiliser le fait que le transposé d’un scalaire est égal au scalaire lui-même. Lorsqu’on dispose d’un produit scalaire dans un espace vectoriel, il est souvent très commode de l’utiliser pour établir certaines démonstrations. De plus, la forme matricielle du produit scalaire se manipule facilement comme le montrent les exemples suivants.
Réciproquement
On obtient donc les résultats suivants.
A titre d’application, on vérifie que si est une matrice unitaire , on a
En effet, on a toujours
Comme
on obtient le résultat.
Soit une base de et
la matrice symétrique définie positive qui définit le produit scalaire dans cette base.
Si l’on désigne par la matrice de et par et les composantes de et dans la base , on
obtient :
Ainsi, l’application est défini matriciellement par :
Comme est inversible, est un isomorphisme et aussi.
Si est une base orthonormée, alors et les applications et ont la
même matrice dans cette base.
1.2 Quelques applications du produit scalaire
Proposition 1.1
Construction de formes bilinéaires symétriques
Soit un espace vectoriel euclidien, et la forme bilinéaire définie par
(1)–Alors est symétrique si, et seulement si, est symétrique ()
(2)–La forme est symétrique positive si, et seulement si, et .
(3)–La forme est un produit scalaire euclidien si, et seulement si, et .
Proposition 1.2
: Majoration des valeurs propres d’un endomorphisme
Soit un espace vectoriel euclidien, un endomorhisme de et son spectre réel. Alors on a les résultats suivants.
(1) Si , ensemble des endomorphismes symétriques, alors l’application :
est continue et on a :
(2) Si et () désignent la plus petite (grande) valeur propres de , alors on a :
(3) Si , alors ses valeurs propres appartiennent au segment
associé à .
Proposition 1.3
Soit une base orthonormée de vecteurs propres de .
Alors on a
D’où
puis
La fonction atteint ses bornes puisque troutes ses valeurs propres sont dans .
Pour démontrer que toute valeur de est atteinte il suffit de démontrer que
l’ensemble
est connexe par arcs puisque est une fonction continue en tant que fraction rationnelle des composantes de .
(1) Si est une droite vectorielle c’est évident.
(2) non liés, l’application de dans ,
est continue. Si lié, il existe tel que libre et libre et on procède
comme ce qui précède. Donc l’ensemble est connexe.
L’application est symétrique et on a
Si est une valeur propre réelle de , on a
Proposition 1.4
: Norme d’un endomorphisme et spectre
(1) Soit . Alors
(2) Soit et la matrice de dans une base orthonorméé de . Alors
Proposition 1.5
: Spectre positif
Soit . Alors les propositions suivantes sont équivalentes.
(1) Les valeurs propres de sont non-négative:
(2) La matrice est égale au carré d’une matrice symétrique
(2) La matrice est égale au produit d’une matrice par sa transposée :
(3) La forme quadratique associée à ne prend pas de valeurs négatives :
(4) Il existe une famille de matrices colonnes telle que soit la matrice de Gram de cette famille:
Proposition 1.6
: Spectre strictement positif
Soit . Alors les propositions suivantes sont équivalentes.
(1) Les valeurs propres de sont strictement positives :
(2) La matrice est égale au carré d’une matrice symétrique inversible
(2) La matrice est égale au produit d’une matrice inversible par sa transposée :
(3) La forme quadratique associée à ne prend que des valeurs positives et ne prend la valeur zéro que si :
(4) Il existe une famille libre de matrices colonnes telle que soit la matrice de Gram de cette famille:
Proposition 1.7
Groupe orthogonal dans un espace vectoriel euclidien
Considérons les sous-ensembles suivants d’un espace euclidien :
Alors
sont respectivement des sous-groupes de
Proposition 1.8
: Diagonalisation simultanée de 2 matrices symétriques
Soient et . Alors
où désigne une matrice diagonale.
Proposition 1.9
Caractérisation d’un projecteur orthogonal
Soit un projecteur .
(1) est orthogonal ssi est symétrique
(2) est orthogonal ssi
(3) L’ensemble des projecteurs orthogonaux , est donné par l’intersection des deux ensembles suivants
et
(4) L’ensemble des projecteurs orthogonaux est compact dans .
1.3 Projecteur orthogonal, Symétrie orthogonale, Isométrie
Proposition 1.10
Projecteur orthogonal en dimension finie
Soit un espace vectoriel de dimension muni d’un produit scalaire défini par une matrice (symétrique et définie positive). Sous forme matricielle, ce produit scalaire s’écrit:
(1) Si forment une base -orthogonale de , alors on a
(2) Une matrice est autoadjointe par rapport à ce produit scalaire (-autoadjointe) si, et seulement si :
Une telle matrice est alors diagonalisable, ses valeurs propres sont réelles et ses vecteurs propres
sont -orthogonaux deux à deux.
(3) Soient un espace engendré par ,
la matrice admettant ces vecteurs comme colonnes et la matrice du projecteur orthogonal
sur . Alors, on a les résultats suivants.
-
1.
Si les vecteurs sont linéairement indépendants, alors la matrice
est inversible et on a :
(2) -
2.
Si les vecteurs ne sont pas forcément indépendants, alors
(3) où est la matrice pseudo-inverse de Moore-Penrose de la matrice .
Preuve
Le projecteur vérifie
De plus, il existe tel que . On obtient
et
Si les vecteurs sont linéairement indépendants, alors la
matrice est de rang plein, est inversible et on obtient
(2).
Si les vecteurs ne sont pas linéairement indépendants, alors la
matrice n’est pas de rang plein et donc n’est pas inversible. la
solution est donnée en utilisant la pseudo-inverse et on obtient
(3).
Proposition 1.11
Pseudo-inverse d’une matrice rectangulaire
Considérons le système linéaire rectangulaire
-
1.
Il existe plusieurs matrices , appelées pseudo-inverses de ,
telles que -
2.
Il existe au moins une matrice vérifiant la relation caractéristique
-
3.
Il existe une seule , notée et dénommée pseudo-inverse de Moore-Penrose,
vérifiant toutes les conditions suivantes.
Proposition 1.12
Caractérisation d’une isométrie
Une isométrie est un endomoprhisme orthogonal, i.e, . Soit . Alors les propriétés suivantes sont équivalentes.
(1) est une isométrie.
(2) conserve le produit scalaire
(3) conserve la norme
(4)
et la matrice de dans une base orthonormée est une matrice orthogonale, i.e,
.
(4) transforme une base orthonormée en une base orthonormée.
(5) Il existe une base orthonormée telle que est une base orthonormée.
Proposition 1.13
Autres propriétés d’une isométrie ??????
Soit une isométrie. Alors les propriétés suivantes sont équivalentes.
(1) Si est stable par , alors son orthogonal est aussi stable par .
(2)
(3)
(4) Si , alors .
Symétrie orthogonale
Soit un sous-espace vectoriel d’un espace vectoriel euclidien . L’endomorphisme
, défini ci-dessous, est appelé symétrie orthogonale.
Comme , une deuxième composition conduit à . De plus, conserve la norme puisque le théorème de Pythagore permet d’écrire :
Comme , alors . Soit une base orthonormée de et
une base orthonormée de , alors est une base orthonormée de dans laquelle la matrice de est la matrice diagonale :
contenant 1 dans les premières colonnes et dans les
suivantes. On a donc
Réflexion orthogonale
Soit un vecteur non nul d’un espace vectoriel euclidien . On appelle réflexion orthogonale
de vecteur , la symétrie orthogonale avec . On la note
et on a donc
1.4 Complexification d’un espace euclidien
Au lieu de considérer l’espace sur le corps des réels, Il est souvent plus commode de le complexifier en prenant les scalaires sur le corps . Cela revient à considérer les scalaires réels comme éléments de . Le complexifié de est donc l’espace des combinaisons linéaires à coefficients sur et le produit scalaire qui devient produit hermitien se définit en conjuguant la seconde composante (par convention).
Les bases réelles de sont aussi des bases de appelées bases réelles mais on peut évidemment prendre des bases dont les vecteurs sont complexes.
Soit un endomorphisme de et sa matrice dans une base donnée de . Le complexifié de est un endomrphisme de qui est défini par la matrice de qui reste évidemment à coefficients réels mais sera vue comme élément de .
L’endomorphisme est réel dans le sens où il transforme un vecteur réel en un vecteur réel.
Donc si est une valeur propre de associé à , alors
est aussi une valeur propre de associé à . Ainsi pour un endomorphisme réel si est valeur propre alors l’est aussi.
Si est auto-adjoint pour un produit scalaire donné, alors est aussi auto-adjoint pour le même produit scalaire. En effet, une base orthonormée de est aussi une base orthonormée de .
Nous présentons dans cette section les propriétés d’endomorphismes particuliers dans le cas d’un produit scalaire à valeurs dans . Ces propriétés seront étendues dans la section suivante au cas d’un produit scalaire à valeurs dans .
On emploi le qualificatif spécifique d’endomorphisme symétrique au lieu d’auto-adjoint qui sera utilisé dans le contexte plus général d’un -espace vectoriel. Dans cette section, un endomorphisme de est dit symétrique s’il vérifie
et l’ensemble des endomorphismes symétriques est noté .
Proposition 1.14
: Noyau et image d’un endomorphisme symétrique
Soit un espace vectoriel euclidien et . Alors on a
Proposition 1.15
: Un endomorphisme symétrique est diagonalisable sur
Soient un -espace euclidien et un endomorphisme symétrique sur . On a les propriétés suivantes.
(1) Le polynôme caractéristique de est scindé sur .
(2) Les vecteurs propres de sont réels.
(3) Les espaces propres associés à deux valeurs propres distinctes sont orthogonaux.
(4) est diagonalisable sur une base orthonormée de vecteurs propres.
Démonstration (1) On note et les complexifiés de et . Dans une base réelle les endomorphismes et ont la même matrice. Par conséquent ils ont le même polynôme caractéristique . Soit une racine de . Cette racine existe toujours sur qui est algébriquement clos et on va montrer que . En effet, est une valeur propre de et si désigne un vecteur propre associé, on a:
Comme est auto-adjoint et , on obtient .
Ainsi, toutes les racines de sont réelles et donc est scindé sur .
(2) Soient et deux valeurs propres distinctes. Comme elles sont réelles, on a :
D’où et donc et sont orthogonaux.
(3) Soient un espace euclidien de dimension et un endomorphisme auto-adoint de . Raisonnons par récurrence sur . Pour il n’y a rien à démontrer. Supposons la propriété vraie à l’ordre . D’après le résultat du point (1), est scindé sur . Soient une valeur propre de , un
vecteur propre associé et l’espace orthogonal de . Cet espace est de dimension et il est stable par , puisque
et donc .
L’espace est euclidien en tant que sous espace de .
La restriction de à est aussi un endomorphisme auto-adjoint de .
Il admet donc une base de vecteurs propres par hypothèse de récurrence.
Ainsi est une base de constituée de vecteurs propres de et la propriété est donc vraie pour .
Le point (4) est évident.
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